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Le réchauffement climatique va multiplier les pandémies

Au cours des cinquante ans à venir, des milliers de virus vont passer d'une espèce animale à l'autre, alerte une étude publiée dans la revue « Nature ». Avec le risque de faire émerger de nouvelles maladies qui pourraient se transmettre à l'homme.

Une équipe de chercheurs près de la grotte de Khao Chong Pran en Thaïlande, sur les traces du virus du Covid-19.
Une équipe de chercheurs près de la grotte de Khao Chong Pran en Thaïlande, sur les traces du virus du Covid-19. (Adam DEAN/PANOS-REA)

Par Muryel Jacque

Publié le 2 mai 2022 à 08:37Mis à jour le 2 mai 2022 à 17:26

« Notre étude est dense et technique, mais les résultats sont effroyables et urgents. » Sur Twitter, les mots du biologiste Colin J. Carlson, enseignant chercheur au Center for Global Health Science and Security de l'université de Georgetown, se révèlent glaçants pour l'avenir de la planète.

Les scientifiques sont nombreux à avoir déjà averti que les pandémies risquaient de devenir plus fréquentes avec le changement climatique, mais le travail mené en équipe pendant plusieurs années par ce jeune biologiste américain ne laisse plus de doute. « Nous apportons la preuve que dans les décennies à venir, le monde sera non seulement plus chaud, mais aussi plus malade », alerte l'écologiste des maladies Gregory Albery, l'un des co-auteurs de l'étude qui sera publiée jeudi dans la revue « Nature ».

Menace pour la santé humaine

Selon ces chercheurs, au cours des cinquante prochaines années, le réchauffement va amener des milliers de virus à passer d'une espèce de mammifère à l'autre. L'étude parle d'un futur « réseau » de virus qui prendra de l'ampleur à mesure que la Terre se réchauffe. Au moins 15.000 transmissions virales entre espèces pourraient avoir lieu d'ici à 2070.

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Ce brassage accéléré entre animaux favorisera l'émergence de nouvelles maladies qui pourront potentiellement se transmettre à l'homme. « Alors que le changement climatique refaçonne la vie sur Terre, il peut également devenir le principal vecteur du risque de pandémie », écrit Colin J. Carlson .

On connaît Zika, la dengue, le paludisme, le chikungunya, qui sont transmis par les moustiques . Mais, aujourd'hui, au moins 10.000 espèces de virus, dont la grande majorité circule pour l'heure « silencieusement » chez les mammifères, sont en mesure d'infecter les être humains, craignent les auteurs. En effet, en poussant de plus en plus d'animaux à fuir leur écosystème pour trouver un habitat plus vivable, le dérèglement du climat et l'utilisation des terres changent la donne . Ils « créeront de nouvelles opportunités de partage viral entre des espèces sauvages auparavant isolées géographiquement », expliquent les chercheurs.

L'étude a modélisé la manière dont plus de 3.000 espèces de mammifères partagent les virus et révèle un véritable « mécanisme » potentiellement dévastateur entre l'évolution de l'environnement sur Terre et l'émergence de maladies. Les scientifiques estiment que leurs déplacements à venir pourraient entraîner plus de 300.000 « premières rencontres » d'espèces, soit deux fois plus que le potentiel actuel… même si le réchauffement reste inférieur à 2° C, ce qui est un scénario optimiste.

Zoonoses

Ces « débordements » redoutés ne sont évidemment pas tous susceptibles de déclencher une pandémie mondiale comme celle de Covid-19, mais le tableau est inquiétant. Les chauves-souris y jouent un rôle central, précisent les chercheurs « en raison de leur capacité de dispersion unique » à travers le monde. C'est d'abord par ces petits mammifères, porteurs de pathogènes comme les coronavirus, que ces derniers pourraient infecter l'homme via un animal hôte. Les chercheurs indiquent que les chauves-souris d'Asie du Sud-Est seront en particulier sujettes à ces transmissions.

Si la menace est mondiale, cette région est avec l'Afrique tropicale l'un des « points chauds » où ces brassages risquent de se concentrer, selon les chercheurs, car la densité de population y sera forte vers 2070. Le Sahel, les hauts plateaux de l'Ethiopie et la vallée du Grand Rift, l'Inde, l'est de la Chine, l'Indonésie et les Philippines figurent parmi les zones les plus exposées.

Colin J. Carlson juge qu'il est trop tard pour inverser la tendance, la simulation faite par les chercheurs montre que les virus ont déjà commencé à être brassés. Il y a un « besoin urgent d'associer les efforts de surveillance et de découverte virale à des enquêtes sur la biodiversité », écrivent les auteurs de l'étude. Mais il faut aussi « préparer nos systèmes de santé » à l'émergence de maladies.

À noter

Au moins six pandémies mondiales ont eu lieu depuis la pandémie grippale de 1918, dont celles du VIH/Sida, du SRAS et du Covid-19, ainsi que trois causées par les virus de la grippe (IPBES, 2020).

Muryel Jacque

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